Des hommes et des dieux - critique du film

:. Réalisateur: Xavier Beauvois
:. Acteurs: Lambert Wilson, Michael Lonsdale
:. Scénario: Xavier Beauvois, Etienne Comar
:. Durée: 2:00
:. Année: 2010
:. Country: France
:. Pays: Des hommes et des dieux

  
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On dit souvent que le(s) premier(s) plan(s), comme le dernier, d'un film, peuvent suffire à soupçonner la présence sous nos yeux d'un chef d'œuvre total (un seul exemple : Apocalypse now) ou d'un navet complet (moult exemples chaque semaine en salles). Au milieu de ces extrêmes, il y a le premier plan des Hommes et des dieux, de Xavier Beauvois. Un couloir filmé frontalement en plan fixe, dans la pénombre ; des silhouettes entrent dans le cadre et se dirigent vers le fond pour disparaître derrière une porte. A la fin du film, ces mêmes silhouettes s'enfoncent, non plus vers le bout du couloir, mais dans un brouillard enneigé. Toujours en silence. Un silence de recueillement, mais aussi un silence de mort. La métaphore est aisée : le couloir de la mort, c'est-à-dire le film tout entier, débouche sur l'exécution, filmée avec pudeur, derrière le voile de la brume qui symbolise le mystère planant encore aujourd'hui autour de ce massacre. Entre ces deux plans, donc, un film sur lequel plane l'ombre de la mort annoncée par l'ouverture.

Le massacre en question ici, c'est celui des moines cisterciens de Tibhirine, en Algérie, perpétré en 1996, au plus fort de l'affrontement entre l'Etat et les groupes terroristes extrémistes dont s'inspire le film. Beauvois met la forme au service de son propos, en privilégiant une photographie aux teintes grisâtres, en filmant un pays solaire et lumineux qu'est l'Algérie comme il filmerait un monde en cendres, en proie à l'obscurantisme. Il compose son cadre avec la précision des rituels des moines. Les saisons se suivent, au rythme lent d'un chant liturgique, le film adopte la diction des psaumes, que ce soit pour mettre en scène les travaux du quotidien, les relations avec les villageois ou les confrontations avec l'armée et les extrémistes islamistes. Plus qu'un film sur la foi, il s'agit avant tout d'un questionnement de la position morale que les personnages doivent prendre. Partir ou rester ? Affronter le danger, accueillir et accepter la mort, se sacrifier, aller jusqu'au bout de ses convictions, au prix de sa propre vie, ou abandonner les villageois et par-là même soi-même ? Autant de questions que se posent individuellement chaque moine, mais aussi globalement la communauté qu'ils forment ensemble. Un beau film, au sens esthétique du terme, où chaque élément se trouve à sa place, fait sens. Cette maîtrise s'avère, hélas, constituer le défaut principal de ce qui devient rapidement un film de bon élève. Dans chaque plan on peut lire les intentions de l'auteur, sa démarche déborde presque du cadre, se veut trop limpide pour laisser place. A force de vouloir coller l'enveloppe du film a son discours, le spectateur finit par avoir deux ou trois coups d'avance sur le récit. Cette façon de tout expliciter achève le ratage du film, et on en sort avec un sentiment de déception : la certitude d'avoir assisté à un bel exercice de style, mais qui empêche toute espèce d'émotion de sourdre. Dommage.


  Moland Fengkov


     Festival de Cannes 2010


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