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Novo
Réalisé par Jean-Pierre Limosin

Avec : Eduardo Noriega, Anna Mouglalis, Nathalie Richard, Eric Caravaca
Durée : 1:38
Pays : France
Année : 2002
Web : Site Officiel
En juin 2002, certains avaient trouvé comme seul reproche à faire au Irreversible de Gaspar Noé sa narration inversée, pompée sur le Memento du sur-estimé Christopher Nolan. Reproche totalement injustifié tant le film, aussi imparfait soit-il, utilise cette narration à une fin autrement plus fondamentale que le polar pseudo-métaphysique sus-cité. Et force est de constater que jusqu'au 25 décembre dernier, Irréversible restait le meilleur film français de 2002.

Ce jour-là, certains auront peut-être fait l'erreur grave et formelle de voir le Novo de Jean-Pierre Limosin comme comme un post-Memento parce qu'il met en scène un homme à la mémoire éphémère. Et dans ce sens là, le film est forcément raté. Pour cause : si on attend de Novo un thriller à l'intrigue alambiquée, on est forcément déçu. Cela-dit, ce spectateur serait idiot de le faire, l'affiche précise (de manière pas forcément appréciable) que l'on va voir un "sentimental manifesto". Rien à voir donc.

Mais surtout, ce serait se méprendre sur, ou ne pas connaître, Jean-Pierre Limosin, cinéaste hors-norme, élevé cinématographiquement à la française, sans avoir jamais caché une profonde fascination considérée presque malsaine dans le milieu, pour la culture pop et l'imagerie qui en découle. Mais au-delà de la forme, c'est la légèreté de cette culture et la liberté qui en découle qui a toujours transparaît dans le travail de Limosin. Ces premiers films ressemblaient à des versions pop et plastiques d'un film de Rivette. Légèreté insoutenable, trop poétique, pensez à du Brisseau aussi positif et optimiste que ce dernier semble verser dans l'obscurité d'une vie moderne, vous comprendrez alors la futilité toute 80 qui se dégage de l'oeuvre de l'homme. Futilité qui échappera à la considération publique et l'entraînera pendant un moment vers la publicité, alors qu'il réalisera contemporainement des documentaires sur certains réalisateurs qu'il considère importants : Abbas Kiarostami, Alain Cavalier, et finalement Takeshi Kitano. Car pendant les dix ans qui ont séparé L'autre nuit de Tokyo Eyes, Limosin a découvert le Japon, empire de la culture pop et libre qui forme le fondement de ses films. Tokyo Eyes était un film inévitable. Et une réussite pop qui le remet sur le devant d'un public qui ne sait plus que l'homme a déjà une oeuvre derrière lui. Que la fraîcheur de Tokyo Eyes n'est pas un hasard dans le travail d'un réalisateur qui, dans un cadre traditionnel, n'a plus l'âge d'une telle futilité. D'un tel manque de profondeur.

De la même manière, Novo apparaît comme le film qu'un réalisateur de 25 ans ne pourrait pas réaliser. Malgré sa forme plastique sophistiquée et contemporaine et l'esprit surfacier qui s'en dégage, le film est un aboutissement rare. Mais un aboutissement qui touche un sentiment que beaucoup préfèrent laisser sur le bas de la route, et qui devient une arme redoutable chez qui sait s'en servir : l'immaturité et l'idée qui la nourrit le plus : la liberté. Une liberté que Limosin semble exiger de lui même à travers chaque séquence filmée, chaque plan. Une légèreté d'autant plus détonnante que le film, co-écrit par Christophe Honoré, a parfois tendance à sombrer dans des artifices littéraires un peu trop appuyés.

Effectivement, si la forme du film raconte l'histoire d'amour qui unit Graham, homme-enfant à la mémoire déviante, à Irène, maîtresse-mère qui se propose de prendre le rôle de cette mémoire pour la lui redonner en lui offrant l'intensité rendue invivable d'un amour quotidien, le fond élaboré par Limosin et Honoré demeure énigmatique à la fin, tant le rapprochement qu'ils tentent de faire demeure effleuré. On voudrait nous raconter les rapports qui lient l'amour à la mémoire, on finit par nous livrer des corps rebondissant entre différents déboires amoureux et existentiels desquels ils sortent indemnes, toujours vierges, immaculés et prêts à se lancer de nouveau dans une action insensée. Insoutenable légèreté de l'Être bien préférable à n'importe quelle digression métaphysique appuyée. Et c'est dans cette course lente et effrénée qu'apparaît le "sentimental manifesto" qu'on nous a annoncé.

Si la mise en image, ses plans furtifs et volés, contribue grandement au sentiment spatial qu'on éprouve en voyant Novo, c'est aussi la mise en scène de deux acteurs magnifiques qui vient troubler les sens du spectateur ébloui. Anna Mouglalis, nouvelle égérie qu'on ne présente plus, apparaît dans son premier chef-d'oeuvre et y apporte une empreinte fétichiste qui restera gravée dans la mémoire de n'importe quel spectateur vicieux. Limosin la dévoile plus belle que jamais, comme si elle avait été prisonnière de rôles qui ne lui correspondaient pas jusque-là. Elle joue, tout simplement, mue par la force immature d'un metteur en scène motivée par la fraîcheur qui s'abandonne à lui. Et c'est la même osmose qui donne à Edouardo Noriega (récitant phonétiquement ses dialogues, géniale idée pour mettre en scène un homme sans mémoire) cette ampleur si légère, déambulant dans le film comme un enfant découvrant les formes d'une vie qu'il n'a pas. D'un amour qu'il ne pourra jamais faire vivre. L'acteur espagnol qu'on a pu voir dans les films d'Amenabar ou Del Toro apparaît lui aussi plus frais et plastique qu'on ne le reverra probablement jamais. Plus libre et dégagé de toute pression morale.

Et c'est justement cette absence, commune finalement à tous les personnages du film, qui rend Novo si particulier, singulier, hors-norme, si peu académique malgré certains aspects formels d'un scénario qui fera probablement frémir n'importe quel détracteur de l'histoire du cinéma français moderne, auquel Novo, dans sa proximité du corps, dans ce qu'il échappe au sens fondamental et à la raison, n'appartient résolument pas. Sans aucun discours auxiliaire, Limosin dépasse sans en avoir aucune intention, tous ces films sur le corps qu'on a vu pulluler sur les écrans ces dernières années. Les Ozon et les Breillat sont sèchement balayés. Leurs envies profondément théoriques nous ennuient. La fausse liberté de Bertrand Bonello le fait passer pour un vieux lourd face à un réalisateur qui serait la forme abâtardie d'un Rivette qui aboutirait formellement son amour de l'air, de l'espace, et encore, de la légèreté.

Car si discours il y a (et il y a définitivement), celui-ci s'arrête au service de l'histoire, laissant le film lui-même se faire porter par ses images follement poétiques, ses corps nus, beaux, trop beaux, trop lisses et trop libres. Echappant à toute appréhension humaine. Dans ce sens, Novo passe sans problème pour un film extra-terrestre. Et la terminologie nous rapproche alors de ce qu'on appelle un film "ovni". Ce sentiment magique présent dans tous les films d'un réalisateur trop libre pour être jamais estimé à sa juste valeur. Provoquant dans ce qu'il pousse autant à l'admiration qu'à la jalousie d'un public triste et pas préparé à se prendre cette violence dans la gueule. La violence d'une liberté visiblement jamais autant désirée et exprimée que dans Novo. Une gifle nécessaire sans être forcément salutaire mais bien trop rare pour qu'on se permette de la bouder en prétextant pauvrement l'analogie injustifiée avec un film apparaissant finalement comme bien inutile.

Une fois que vous aurez vu Novo, vous pourrez permettre à votre mémoire cinématographique de toucher à l'oubli de certains parasites qui vous auraient empêché de vous approcher d'une certaine vérité. Celle du cinéma, qui est semble si difficile à accepter.

  Virgile Iscan




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