critique du film Son frèreSon frère Critique du film






Son frère













        :: Les Sorties
     :: Sur les Ecrans
     :: Agenda Sorties
     :: Sorties DVD
     :: Guide Previews
     :: Archive Critiques

<-- AdButler 120x90 Code was here -->

Gratuit - Les nouvelles critiques par e-mail
 
Powered by YourMailinglistProvider


Son frère
Réalisé par Patrice Chéreau

Avec : Bruno Todeschini, Eric Caravaca, Maurice Garrel, Antoinette Moya
Scénario : Patrice Chéreau, Philippe Besson
Durée : 1:35
Pays : France
Année : 2003
Evocation vibrante des relations complexes qui unissent deux frères, dont l'un souffre d'une maladie rare, le dernier film de Patrice Chéreau ne se contente pas d'être intense, interprété de manière magistrale, il est aussi une subtile radiographie de l'âme humaine. Plus que le récit d'un accompagnement dans la mort, Son Frère atteint à l'universel en ce qu'il renvoie chacun à ses origines et à sa propre finitude.

La pathologie affectant le héros — une maladie du sang — n'est que le symptôme par trop évident d'une autre dégénérescence : celle d'une fratrie disloquée, cellule malade, altérée par l'incommunicabilité et l'éloignement progressif. Le « mauvais sang » qui coule dans les veines du personnage renvoie aux « liens du sang » équivoques, à l'oeuvre dans le film. Le sang, substance vitale (mais ici létale), compose un motif essentiel qui traverse les canaux sinueux du récit, créant des correspondances douloureuses entre les personnages.

On retrouve là un thème développé par Patrice Chéreau dans La Reine Margot. Empoisonné, Charles IX (Jean-Hugues Anglade), fruit corrompu d'une famille dégénérée, meurt au terme d'une lente agonie, exsudant son propre sang. Dans Son Frère, le personnage interprété par Bruno Todeschini (transfiguré) peut, à tout moment, succomber à la moindre hémorragie. La scène de plage, où il saigne du nez, se charge d'une intensité mortifère, renforcée encore par la lumière blafarde qui baigne la scène et enveloppe, comme un linceul, son corps cachectique. De même, la chemise de nuit blanche de Charles IX se transforme peu à peu en un suaire sanguinolent, recouvrant son corps de supplicié. Frères de cinéma et frères de sang, ces héros figurent à l'écran la tragédie des familles divisées.

Les retrouvailles sont vécues difficilement. La scène où l'aîné se rend dans l'appartement de son frère (Eric Caravaca) a tout d'une intrusion. Comme deux animaux, les personnages se jaugent, s'observent, se frôlent. La violation du territoire privé ne s'arrête pas là. Peu à peu, l'intime est vampirisé par la maladie et ses tyrannies, éclipsant tous les satellites qui gravitent autour de la fratrie (les parents ou la petite amie qui abdique, à bout de forces).

Chéreau ne verse à aucun moment dans le pathos et c'est là la grande force du film. Les personnages se traitent sans aménité. Le rapprochement s'opère par les corps et non par le langage, graduellement et très pudiquement. Les étreintes, violemment émotionnelles, en disent plus long que les discours relatifs à un passé relégué. En témoigne la scène d'hôpital où le frère cadet évoque un souvenir d'enfance. Endormi, son aîné ne peut recevoir la confidence.

Le filmage éminemment sensitif de Chéreau touche à l'ineffable : les corps écrivent le récit, inventent leur propre espace. La scène de préparation du malade avant son opération — insoutenable par sa durée et son hyper réalisme — est, en ce sens, emblématique. En une séquence, le cinéaste donne à voir l'inéluctable. Le corps est rasé, lavé comme lors d'une toilette mortuaire.

Si les acteurs sont dirigés selon une méthode très dramatique, Patrice Chéreau saisit ce qui prévaut au cinéma : le temps. Ce dernier travaille en creux la fiction, d'après le même processus malin qui entame inexorablement le corps du héros. Des lacis temporels s'enchevêtrent selon un déroulé, de prime abord aléatoire, avant qu'un ordonnancement secret n'apparaisse. Tout le génie du montage se révèle alors. Les indicateurs temporels s'effacent peu à peu pour laisser dialoguer les séquences entre elles.

In fine, toutes les scènes convergent vers l'acceptation de la mort. Que le personnage décide de quitter l'hôpital ou qu'il se plonge dans des eaux funestes, il entérine sa disparition. D'ailleurs, ces deux séquences « d'immersion », au sens propre comme au figuré (dans le monde, avec la sortie de l'hôpital puis dans l'océan) participent du même mouvement et se juxtaposent dans le film. Le dernier segment narratif se conjugue au présent du deuil. « Ashes to ashes, dust to dust » scande Marianne Faithfull de sa voix rauque, achevant de rendre sensible l'idée que l'homme est au coeur d'un cycle immuable. Cette captation inspirée du temps fait de Son Frère assurément l'un des plus beaux films de cette rentrée.

  Sandrine Marques





| Info Plume Noire | Contacts | Publicité | Soumettre pour critique |
| Rejoignez-Nous! | Chiffres-clés | Boutique | Mailing List | Charte |

Copyright ©1998-2006 LA PLUME NOIRE Tous droits réservés.


Son frère DVD BO poster livre store
  AllPosters


Like Us On Facebook