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L'Évaporation de l'homme  (Ningen Johatsu)













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L'Évaporation de l'homme (Ningen Johatsu)
Réalisé par Shohei Imamura

Avec : Yoshie Hayakawa, Shohei Imamura, Shigeru Tsuyuguchi
Durée : 2:10
Pays : Japon
Année : 1967
Oshima Tadashi, agent commercial, la trentaine, a disparu. Ses parents et sa fiancée Hayakawa Yoshie, blessée plus qu'inquiète, ont déposé un avis de recherche. Le réalisateur décide de partir avec son équipe pour enquêter sur sa disparition.

Les témoignages des amis, des voisins, des parents, des collègues, se succèdent, et le portrait d'Oshima se dresse. Pourquoi est-il parti ? Est-ce parce qu'il a détourné une forte somme d'argent de son entreprise ? Ou bien parce qu'il a séduit Sayoko, la sœur de Yoshie ? Est-il toujours en vie ? Avec la peinture de Tadashi apparaît, plus amère et plus complexe, celle de Yoshie.

Dans la filmographie d'Imamura, L'évaporation de l'homme (1967) intervient au moment où il a quitté la Nikkatsu, avec qui il avait collaboré sur des films majeurs comme la Femme Insecte (1963). A la suite de cette rupture, Imamura a créé sa propre société de production, Imamura Productions, et afin d'obtenir une plus grande indépendance, il est dorénavant distribué par la Art Theatre Guild, créée quelques années avant pour la distribution de films indépendants et artistiques (japonais ou étrangers) qui ne trouvent pas acheteur auprès des majors japonaises comme Toho ou Toei.

Dans ce contexte de liberté artistique, Imamura peut enfin pulvériser les frontières habituelles du film, et compose avec une habileté déconcertante une œuvre où fiction et documentaire se télescopent. C'est le constat que chaque année au Japon des milliers de personnes disparaissent sans laisser de trace (johatsu signifie « évaporation » mais aussi « fugue ») que le réalisateur de l'Anguille a bâti son film. Mais il n'a pas voulu l'articuler selon des schémas classiques. Plutôt que d'écrire un scénario, il s'est contenté de ses notes pour articuler son œuvre avec cohérence.

Cet embrouillamini dans lequel interviennent tous les bons ingrédients de l'enquête policière tels détournement d'argent et histoires de cœur, est si habilement ficelé que rapidement les frontières entre la réalité et la fiction s'évaporent à leur tour.

Les deux côtés de la caméra interagissent et s'emmêlent. L'équipe de cinéma intervient dans le film. L'acteur Tsuyuguchi Shigeru (un habitué d'Imamura) apparaît à l'écran et mène des interviews. Puis Yoshie, égarée, avoue l'amour naissant qu'elle porte au réalisateur. Le film pose ainsi, à un second niveau, la question de l'influence de l'équipe de documentaire sur le sujet qu'elle étudie, et par conséquent, dans quelle mesure on peut considérer un documentaire comme une représentation fidèle, unilatérale, de la réalité.

Le point culminant du croisement filmant / filmé est atteint lorsque, en plein milieu d'une scène réaliste, la confrontation violente entre Yoshie et Sayoko, le décor est défait, le studio est révélé à nos yeux stupéfaits, et Imamura, comme dans une leçon de cinéma, nous enseigne que la frontière entre fiction et réalité est étroite. Le spectateur se retrouve lui-même sur le plateau, témoin démasqué, interpellé, tiré de sa passivité. Les acteurs, les techniciens, les amis et la famille d'Oshima, tous se retrouvent alors et une discussion animée s'engage spontanément (tout au moins en apparence). On ne sait plus si on regarde un documentaire sans narration ou une fiction. Qui est comédien ? Qui est enquêteur ? Où s'arrête la mise en scène et où commence l'improvisation ?

Ni l'enquête ni les questions du spectateur médusé ne trouveront de réponse.

En outre, le film d'Imamura paraît franchir les limites acceptables du respect de la vie privée. Les rivalités entre les sœurs Hayakawa explosent en crises de larmes ou de rage, le spectateur les prend en pleine face. Les doutes de Yoshie sont violés par le regard inquisiteur de la caméra, et son humiliation d'avoir été trompée et abandonnée est mise à nu. Veut-elle vraiment retrouver Tadashi ? Ou veut-elle plus probablement s'affranchir du déshonneur qu'il lui a infligé, et régler ses comptes avec sa sœur ? Imamura dévoile à tous et toutes les doutes les plus intimes de Yoshie, et ainsi le spectateur fait sienne cette enquête dont la vraie intention pourrait bien n'être qu'une curiosité malsaine. A travers la violation de la vie privée, du déshabillage intégral d'un être déjà humilié et brisé, jaillit un sujet certes banalisé aujourd'hui, dans ce monde dominé et régi par la télévision, mais qui doit tout de même être abordé différemment à l'aune de ce qu'était le petit écran en 1967 : le voyeurisme.

L'Evaporation de l'homme montre une nouvelle fois l'intérêt d'Imamura à dépeindre l'homme ordinaire à travers ses relations sociales, mettant l'accent sur les milieux modestes et sur les femmes ; il illustre enfin une des thèses directrices de l'œuvre d'Imamura, selon laquelle les hommes agissent finalement selon leurs instincts.

Réjouissons-nous donc que ce film ait enfin connu une sortie en salles, même si c'est trente-cinq ans trop tard. Pour tout cinéphile averti, il reste un must. Pour les autres cependant, il semblera un peu long (2h10) et confus.

  Laurent Ziliani




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