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Eros therapie
Réalisé par Danièle Dubroux

Avec : Isabelle Carré, Catherine Frot, Melvil Poupaud, François Berléand
Scénario : Danièle Dubroux, Pascal Richou
Durée : 1:46
Pays : France
Année : 2004
Deux ans que le dernier long métrage de Danièle Dubroux (L'Examen De Minuit, Borderline…) dormait dans la désaffection des cartons des distributeurs. Et le voici investissant les salles obscures sous des attributs marketing grivois bien fallacieux. Pourtant, à la circonspection initiale succède un sentiment de délicieuse surprise une fois les indéniables qualités de l'œuvre distillées. Il y est question de déconstruction identitaire et d'une soif inextinguible de compréhension ou pour être plus précis nous sommes invités à suivre le fil délicat d'une parade distendue devant un sujet charnel et ténu, la libido contemporaine. N'y cherchez donc pas les afféteries lénifiantes dont est friand, par exemple, le cinéma de François Ozon — au point de saper le triptyque séduction/possession/destruction de son adaptation empesée de Fassbinder. Au contraire, nous sommes happés par la tectonique du désir d'un homme dépité (Adam) mis à l'index par sa femme bisexuelle (Agnès) elle-même entichée d'une journaliste de cinéma lesbienne (Catherine) dont est bientôt épris un maître de cérémonie pour dominatrice sadomasochiste (Bruno), ami de fraîche date du mari éconduit. Un singulier ouroboros qui stigmatise sans complaisance la honte sourde qui submerge l'individu après l'abandon passager à ses pulsions les plus secrètes. Ce halo de poussière lubrique et anxiogène (le retour de la sublime Isabelle Carré dans l'appartement où elle a commis sa faute) finit par empourprer notre regard de lourdes fragrances, celles de nos paradoxes intimes.

Le film s'appuie sur une structure dichotomique détraquée qui lui permet d'épouser brillamment le processus masculin d'excitation et de jouissance. Que le titre initial et castrateur Je Suis Votre Homme fut abandonné n'empêche aucunement le récit de remplir son office : nous plonger dans les faux-semblants — clin d'œil à David Cronenberg — de ce plaisir composite associant pudeur et vice, vie exubérante et mort desséchée mais surtout turgescence brutale et apaisement fugace. Des considérations duales et antagonistes agrégées avec une virtuosité stupéfiante sur une médiane cinégénique, stérile et improbable. Loin d'une séparation coupable des deux pans de personnalités vacillantes comme pouvait le laisser subodorer les deux concepts opposés (Eros et Thanatos) sous-tendant chaque segment de l'intrigue, la cinéaste entreprend l'exploration du couple moderne clivé par l'interpénétration de deux modalités stylistiques opposées, soit la confrontation de cette paire d'êtres dans une comédie aux relents d'inquiétante étrangeté. Se télescopent ainsi de multiples sensations, la lumière du jour qui frôle une couche saphique achoppant l'obscurité de caves humides et pernicieuses, une virilité déclinante et une matrone tyran domestique, le plaisir et la souffrance s'acoquinant mais surtout l'interférence entre univers diurne et onirisme nocturne. Un coït qui culmine par la représentation architecturale, témoin monolithique des émois. Des formes euclidiennes et inamovibles (lieux propret, cossus et étouffants) à la morbidité toute somatique dans lesquelles s'épanchent presque par capillarité de candides intentions.

Les interrogations sur le couple conduisent immanquablement à l'impasse aussi bien narrative que structurelle. La solution pérenne pour que cette œuvre délirante et cotonneuse découvre sa complétude se dessine lentement, par l'initiation d'un véritable processus de dilution et de décuplement. L'ouverture des vannes entre folie maternelle atavique et création timide d'une entité, avant tout sexuelle (babil ralenti d'une serviette, choix inspiré d'un déguisement physique ou mental ou simplement d'une coiffure). Les manifestations des tourments arides du mâle, sa petite mort (simulée) ou celle paroxystique et théâtrale de sa compagne, sont autant de symboles exponentiels favorisant l'exploration par le spectateur de son inconscient. Engagé dans une lutte similaire et éprouvante contre la dislocation léthargique de l'identité le héros incarné par François Berléand s'ingénie à recomposer son corps et sa conscience en charpie par le recours parfois démiurgique à la voix-off. L'ouverture de la malle de Pandore permet alors de dialectiser avec sa moitié amputée et de parachever son exorcisme latent. Et le film de vibrer de conserve avec le suspendu Femmes En Miroir de Kiju Yoshida, pour suivre la scarification de cœurs meurtris (les leurs, les nôtres), à l'acmé de laquelle nous sommes précipités dans les profondeurs de fantasmes piteux et magnifiques.

Le couperet tombe et Julie Depardieu, alter ego de l'artiste à l'écran, nous instruit sur l'indispensable existence de victimes et de bourreaux. Le discret humaniste qui avait baigné jusqu'ici la monstruosité des rapports disparaît pour un constat terrifiant sur le nouveau prélude à l'amour, la mort, celle du désir transmué en froideur prophylactique au gré de rituels irradiés de malaise. La conclusion s'impose pour les époux, la communion charnelle revêt des atours incestueux. C'est dire l'inanité des illusions et réflexes sociétaux ainsi que la phobie tétanique de la dualité voire de l'altérité érotique. L'intimité chaleureuse déserte un espace autarcique avant qu'une aberration ne dynamite l'ensemble : l'utopie pétillante et roborative du triolisme hybride. L'ombre diffuse charriée par la caméra peut alors effleurer les corps à loisir — pour vivre heureux vivons cachés ironise Agnès —, les enveloppant dans le clair-obscur d'alcôves veloutées. Jusqu'à enfanter une jumelle absconse et brumeuse pour Catherine, vierge éplorée idoine à l'expiation de Bruno. Des millénaires d'évolution et de contingences pour qu'un Adam égaré porte un regard lucide sur son existence et celle de ses congénères. Il peut ainsi instiller un nouvel ordre tout de légitimité et d'aisance plénière, un retable sécurisant avec à la droite du père dévoyé Eve la névrosée et à sa gauche Lilith la pimbêche. Une situation presque enviable pour un auditoire ébranlé par un cheminement psychanalytique insidieux, aux prises avec les affres d'une catharsis trop longtemps refoulée.

  Frédéric Flament





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