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Amen
Réalisé par Costa-Gavras

Avec : Ulrich Tukur, Mathieu Kassovitz, Ulrich Mühe, Michel Duchaussoy
Durée : 2:10
Pays : France, Allemagne
Année : 2001
Web : Site Officiel
Film témoignage, Amen revient sur le silence de l'Eglise devant le massacre des populations juives d'Europe. Au-delà de la polémique stupide sur l'affiche de Toscani, ou même du simple réquisitoire contre le pontificat de Pie XII, l'adaptation cinématographique de la pièce de Rolf Hochhuth Le Vicaire démonte la mécanique diabolique de la diplomatie et de la neutralité. Un film utile, pour remettre à l'heure les pendules de l'histoire.

Que peut le concert des nations devant le cri de l'homme qui souffre ? Quelle miséricorde le chant des peuples et des Etats souverains a-t-il à lui apporter ? C'est une balle seulement, qu'on entendra résonner en 1936 dans le palais de marbre froid de la Société des Nations, ancêtre de ce « machin » en devenir si justement croqué par De Gaulle. De ce premier silence à tous les autres, en passant par celui d'un autre célèbre palais de marbre, romain celui-là, Costa-Gavras a fait le leitmotiv de son dernier film. Un énième aveu, en quelque sorte, de l'impuissance des hommes et des gouvernants à répondre au mal ou même à le dire. Et quel homme, autre que ce fameux vicaire, était mieux inspiré pour crier contre ce nouveau massacre des innocents ?

C'est faire peu de foi des devoirs de la diplomatie : le pape dirige la Cité spirituelle mais est également la tête pensante et agissante d'un pouvoir temporel qui se plie aux nécessités de la neutralité. « Le cœur d'un chef d'Etat doit être dans sa tête » a dit un jour Napoléon qu'on ne peut soupçonner d'avoir négligé ces contingences. Le grand écart de ce pape germanophile, ancien nonce dans la capitale allemande, apparaît alors impossible. Et si, comme le clament ses hagiographes jésuites, Pie XII était si désespéré devant le martyre des peuples ne pouvait-il rien faire, ou dire du moins ? Le renoncement du Verbe a-t-il jamais été plus criant que durant ces années où Dieu a déserté l'Europe et les cœurs ?

L'ironie veut que ce soit l'officier de la Wehrmacht, SS malgré lui et inventeur du zyklon B qui tente de sauver l'honneur. Sans doute trop protestant - le beau mot - et pas assez nazi au goût du nouveau nonce apostolique à Berlin, on refuse de l'écouter, certain d'avoir affaire à un traître, un espion ou un fou dangereux. C'est que l'homme revient de loin : son gaz destiné à purifier l'eau et lutter contre le typhus a trouvé une nouvelle utilisation « hygiénique ». Le mot qui fait peur est déjà à l'oeuvre dans les territoires de l'Est et se commet avec d'autres sinistres termes : productivité et industrie. Le regard rivé à l'œilleton de l'une de ces douches construites à la hâte, l'homme découvre avec stupeur l'indicible. Le baraquement tremble durant quelques secondes, sans conteste les plus terrifiantes du film, puis plus rien.

S'en suit une interminable et laborieuse course poursuite contre ce Mal absolu réinventé par le 20e siècle. De Berlin à l'imprenable citadelle du Vatican, où prélats et courtisans protègent un pape lunaire, l'Allemand devra frapper à toutes les portes pour se faire entendre. Aidé par Fontana, un jeune Jésuite introduit au Saint Siège (seul personnage fictif de la pièce de Rolf Hochhuth), Gerstein répètera inlassablement son histoire. Et malgré, ou plutôt, à cause de l'énormité des chiffres, véritables ennemis du témoignage, on lui imposera une fin de non recevoir. Oubliée la condamnation qui s'imposait au vicaire du Christ, oubliées les cinq lettres formant le mot JUIFS, absent de tous les sermons et homélies du Saint Père. Il faudra attendre la grande rafle de Rome où « juifs du pape » et convertis seront embarqués par la SS pour que le Vatican proteste officiellement, arguant « qu'il y a des limites ». On pourra les trouver bien floues.

Il est vrai que l'aveuglement et les atermoiements vaticans ne sont seuls à se faire écharper : les Alliés sont aussi renvoyés dos à dos. Aux difficiles relations entre le Saint Siège et le régime nazi (notamment concernant « l'euthanasie » des malades mentaux et l'impôt religieux), répondent l'effort de guerre et les hypocrites absurdités de la Convention de Genève interdisant de bombarder des camps de prisonniers. Sans doute jamais l'anticommunisme farouche du Vatican a-t-il eu si beau jeu : pourquoi condamner Hitler alors que le nouveau partenaire des Alliés est Staline ? Pourquoi provoquer la colère du chancelier - et peut être aggraver le sort de millions de chrétiens en Europe - alors qu'on peut temporiser par de belles et lénifiantes paroles ? « Mon cœur saigne pour les victimes, je prie pour elle » déclare Pie XII au plus fort du conflit. C'est cette fois-ci, sans doute, que la barbarie prit définitivement sa revanche sur la prière.

Il y a de grandes et belles idées cinématographiques dans Amen : cette image saisissante de Gerstein devant les chambres à gaz, ces officiers nazis qui détournent la tête un instant, ces convois vides qui repartent vers l'ouest, locomotives vociférantes et wagons grand ouverts. Mais le film pèche surtout par l'incongruité de la langue anglaise qui le dénature et lui fait perdre sa vérité. Il aurait fallu parler allemand et italien pour que le voyage au bout de la nuit de Gerstein et Fontana prenne toute sa densité. Il aurait fallu jouer sur ces difficultés à communiquer et peut être resserrer quelque peu le scénario de Jean-Claude Grumberg. Il aurait fallu enfin réveiller Mathieu Kassowitz avant les dernières vingt minutes du film au cours desquelles il donne enfin à son magnifique personnage la dimension christique qui lui revient.

Esthétiquement à demi réussi, moralement triomphant, Amen se ferme sur les jardins et les fontaines romaines, où un bon docteur qu'on appellera enfin Mengele reçoit des mains d'un prélat miséricordieux un passeport pour l'Argentine. Mais pour mettre un terme à cette polémique qui déchire la communauté des croyants - la canonisation de Pie XII sans cesse reculée, demeure à ce jour extrêmement controversée - on ne le dira jamais assez : si l'Eglise n'a rien à cacher, qu'elle ouvre ses archives.

  Corinne Le Dour Zana

     Le site du Vatican (multilingue)
     Les messages de Pie XII (À noter que la biographie de Pie XII n'est pas disponible)





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